Le document de référence est le CGE (compte général de l’Etat, rédigé par la Cour des Comptes et disponible sur le site du Ministère du budget).
1) Le Compte de Résultat (Recettes et dépenses)
Le Compte de Résultat présente l’ensemble des recettes et des dépenses engagées de l’Etat, indépendamment de leur date d’encaissement ou de décaissement.
Le déficit 2010 s’élève à 112 Mds, c’est-à-dire que les dépenses excèdent les recettes de 112 Mds, soit de plus de 40% des recettes !!
a) Les recettes : 271 Mds
Les recettes de l’Etat proviennent exclusivement de l’impôt, payé soit par les ménages, soit par les entreprises ; il n’a pas d’autres recettes significatives.
Elles s’élèvent en brut à 368 Mds ; du fait d’un montant de 95 Mds d’exonérations fiscales (25% des recettes brutes), la recette nette s’élève à 271 Mds d’€.
Ces exonérations affectent principalement la TVA (57Mds), l’Impôt sur les Sociétés (19 Mds) et l’Impôt sur le Revenu (17 Mds) :
Les bénéficiaires des exonérations d’IS (entreprises) et d’IR (ménages) sont évidents ; la réponse est plus complexe pour les bénéficiaires des exonérations de TVA, dont la répercussion par les entreprises aux ménages s’avère inégale (voir les analyses existantes sur l’efficacité des exonérations fiscales sur le dynamisme de l’économie…et l’augmentation des dites recettes fiscales !!).
Par ordre de montant collecté décroissant :
- N° 1 toutes catégories : Taxe sur la Valeur Ajoutée= TVA (130 Mds d’€)
- Impôt sur le Revenu = IR (48 Mds d’€)
- Impôt sur les Sociétés = IS (35 Mds d’€)
- Droits d’Enregistrement, timbres… (15 Mds d’€)
- Taxe sur les produits pétroliers = TIPP (14 Mds d’€)
- Amendes, prélèvements sur les jeux… (6 Mds d’€)
- Impôt sur la Fortune= ISF (5 Mds d’€)
- Autres impôts (19 Mds d’€)
b) Les dépenses : 384 Mds
L’Etat les engage pour exercer ses pouvoirs et assumer ses missions.
- Dépenses de fonctionnement : comme le nom l’indique, ce sont les dépenses nécessaires au bon fonctionnement de l’Etat (166 Mds d’€).
Elles se composent principalement de charges de personnel pour 52% (2.1 millions de fonctionnaires d’Etat), de pensions (retraite et invalidité) pour 28%, d’achats divers et de subventions (24 Mds) au profit d’Etablissements Publics Nationaux (recherche, formation supérieure, action culturelle…).
- Dépenses d’intervention : dépenses motivées par la mission de régulateur économique et social de l’État : ce sont principalement des transferts au bénéfice des collectivités territoriales, des ménages, entreprises, et autres (168 Mds d’€).
60% des dépenses sont des transferts au bénéfice des collectivités territoriales, le solde se répartit entre les ménages (19% : aide au logement, contribution au RSA…), les autres collectivités (14 % : régime de retraite de la SNCF, aide au développement de pays tiers, enseignement et recherche via l’ANR et l’Agence Spatiale Européenne…) et enfin les entreprises (8% du total,13 Mds : exonération de cotisations, soutien à la pêche, l’agriculture… ).
- Frais financiers : ce sont les dépenses d’intérêt des dettes long terme et court terme (41 Mds d’€) : ils correspondent, pour une dette nette moyenne 2010 d’environ 1 268 Mds, à un taux moyen de financement de la dette d’environ 3,2%, soit un taux très bas, lié à la situation sur le marché des taux depuis plusieurs années et à la qualité de la signature de l’Etat Français auprès des préteurs.
Attention si l’Etat emprunte à 4.2% au lieu de 3.2%, alors les dépenses d’intérêt augmentent de 13 Mds par an !!
Les taux auxquels l’Etat emprunte sont fonction de la situation générale de l’économie, mais également de la confiance des préteurs dans la capacité de l’Etat à rembourser ; cette confiance se matérialise par une note, donnée par des agences indépendantes de notation : ces notes sont données sous forme de lettres, c’est le fameux AAA (triple A) de l’Etat Français, qu’il faut donc conserver pour éviter le renchérissement de la dette de l’Etat.
Remarque : l’Etat français bénéficie de la notation triple A, comme l’état allemand ; pour autant ce dernier emprunte à des taux significativement inférieurs à celui de l’état français (70 points de base environ en octobre 2011, soit la différence entre 3,7% de taux d’intérêt et 3%) :
Il y a donc des triples A + et des triples A – !! Autre façon de le dire, les préteurs aux états tiennent compte de la notation des agences, mais se forgent aussi leur propre conviction.
- Produits financiers : ils sont principalement constitués de produits reçus des participations de l’Etat (8 Mds), dès lors qu’elles sont bénéficiaires (cf au bilan la liste des participations).
- Subvention au bénéfice du budget de l’Union Européenne (18 Mds d’€).
2) Présentation et Analyse du Bilan à fin 2010
Le bilan présente une photo à fin d’année du patrimoine et des dettes de l’Etat.
a) Le Patrimoine (Actifs) :
- Immobilisations corporelles (441 Mds d’€) : terrains, constructions, matériel militaire, routes, ouvrages d’art ; les monuments historiques sont valorisés à 0.
- Participations financières : l’Etat détient des participations dans près de 900 entités, pour environ 260 Mds d’€ :
770 entités sont contrôlées par l’Etat, dont 570 sont des opérateurs de l’Etat (intervenant purement dans le cadre de missions de service public confiées par l’Etat : participation dans le CEA = 13 Mds, ONF = 10 Mds…) et 200 des EPIC (Etablissements Publics Industriels et Commerciaux) tels que la SNCF, participation = 7 Mds, EDF = 26 Mds, la Poste= 4 Mds, la RATP= 3 Mds …
130 sont non-contrôlées, et sont composées d’entités du secteur marchand (Caisse des Dépôts = 24Mds, Banque de France = 26Mds, GDF-Suez à 36% = 12Mds, France Telecom à 13% = 5Mds) et non-marchand (FSI = 10 Mds, Association Internationale de Développement = 12Mds…).
- Créances rattachées à des participations : principalement des prêts de l’Etat à des entités contrôlées par lui, en charge d’ »investissement d’avenir » (ANR, OSEO, ADEME, ONERA…)
- Prêts et avances : 17 Mds d’€, principalement composés de prêts de l’Etat Français à des Etats étrangers.
- Créances des redevables d’impôt (sommes dues par les contribuables et pas encore payées) : 47 Mds d’€.
b) Les Dettes financières :
Montant : 1 255 Mds d’€, d’OAT (Obligations Assimilables du Trésor) principalement à taux fixe (80%).
Maturité (durée de remboursement) :
Elle se répartit ainsi :
- 23% soit 281 Mds à rembourser dans les 12 mois
- 33% soit 405 Mds à rembourser entre 1 et 5 ans
- 44% soit 532 Mds à rembourser au delà de 5 ans
L’essentiel de la dette est à rembourser sur des durées longues ; c’est plus facile de rembourser sur une durée longue, car l’effort à fournir chaque année est moins élevé ; mais ça coûte beaucoup plus cher en intérêts qu’une durée courte, car les intérêts se paient tant que dure le remboursement de la dette !!
Par ailleurs il faut noter que l’Etat doit rembourser la bagatelle de 281 Mds dans les 12 mois, et que comme il n’en a pas les moyens il va devoir emprunter la totalité de la somme, plus de quoi financer le déficit 2011 : voilà de quoi donner le vertige !!
c) La trésorerie :
La trésorerie de l’Etat se compose de :
- principalement de liquidités déposées par des tiers (collectivités locales, hôpitaux, établissements publics…) auprès du Trésor, pour 110 Mds
- de liquidités qui lui appartiennent : 25 Mds.
Le solde est négatif de 85 Mds.
La dette nette de l’Etat = dettes financières – trésorerie positive
Fin 2009 elle s’élevait à 1 128 Mds
- Fin 2010 elle s’élève à 1 230 Mds ; soit une augmentation sur un an de 102 Mds ; durant la même période le patrimoine de l’Etat n’a pas significativement évolué ; cette augmentation s’explique principalement par la nécessité de financer le déficit des recettes sur les dépenses.
d) Les investissements : 60 Mds
On parle d’investissements pour désigner des dépenses qui n’ont pas vocation à payer des salaires ou à acheter des consommables (énergie,fournitures de bureaux…), mais qui sont engagées pour acheter des machines, des véhicules…
Les investissements directs de l’Etat en 2010, hors investissements financiers, s’élèvent à 59.2 Mds d’€, et se décomposent ainsi :
- investissements dits incorporels (logiciels…on ne peut pas les toucher) : 4.2 Mds
- investissements corporels (machines, véhicules…) : 55 Mds, dont 19 Mds pour le matériel militaire et 6 Mds pour des terrains et des constructions.
Ce chiffre ne prend pas en compte 1 Md de subvention d’investissement versé aux Etablissements Publics Nationaux (Universités, centres de recherche scientifique,Bibliothèque Nationale de France, Musée du Louvre…).
3) Engagements de garantie de l’Etat à fin 2010
L’Etat a apporté sa garantie de remboursement à 130 Mds de dettes ou d’engagements pris par des tiers privés ou publics (liste « à la Prévert ») ; principalement :
a) Garantie accordée pour des missions d’intérêt général
- Assurance : la garantie de l’Etat peut être mise en jeu pour faire face à certains risques, principalement le risque catastrophe naturelle (pour un total de 3 Mds)
- Soutien aux exportations via la Coface, au titre de 6 procédures de soutien aux exportateurs (assurance –crédit, garantie de risque économique…) :
- Garantie de protection des épargnants sur les livrets d’épargne : un encours de 314 Mds objet de la garantie ; le risque de mise en jeu de la garantie de l’Etat, compte tenu des règles de gestion de cette épargne, ont conduit à la mise en place d’un Fonds Pour Risques Bancaires Généraux d’une valeur de 1,8 Mds.
b) Garanties accordées à des banques multilatérales de Développement Economique
(principalement BEI et BIRD), permettant à ces banques de lever des financements sur les marchés financiers.
c) Engagements financiers de l’Etat
- Engagements en matière d’Epargne Logement (21.5 millions de plans ouverts par des Français, 222 Mds d’encours).
L’Etat accorde une prime d’épargne aux titulaires, qui fait l’objet principalement d’une provision pour charges, et accessoirement d’un modeste engagement hors bilan.
- Dispositif de refinancement des pays les plus endettés (1 Md).
d) Engagements de retraite au titre des fonctionnaires
Il est estimé à 1 200Mds, 746 Mds pour les retraités et 454 Mds pour les actifs.
4) Le Service de la dette de l’Etat en 2010
Le service de la dette comprend le paiement des intérêts et les remboursements en capital.
Le paiement des intérêts a représenté 42 Mds d’€ (l’équivalent de l’IR, du budget de l’Education nationale).
L’Etat a procédé au remboursement de 111 Mds d’€.
Ainsi le service de la dette a représenté 153 Mds d’€ en 2010.